Supprimer la cotisation sociale pour rassasier les actionnaires
Le monde politique s’agite beaucoup en ce moment autour de la cotisation sociale.
De quoi parle-t-on ?
Il s’agit des cotisations qui permettent de payer des prestations sociales tant dans les domaines de la santé, des allocations familiales, de la retraite, d’accidents du travail ou du chômage pour les plus importantes.
L’entreprise (qu’il ne faut pas confondre avec l’employeur) et les salariés en payent chacun une partie plus ou moins élevée .
Certaines cotisations sont payées uniquement par l’entreprise par exemple concernant les accidents du travail et les allocations familiales pour ce qu’il en reste après les reculades des socialistes.
La cotisation est retenue chaque mois sur la feuille de paie et versée sous différentes formes aux salariés-es selon leurs besoins tout au long de la vie. Ces besoins sont en fonction des problèmes qui se présentent à l’assuré et à sa famille pour l’éducation et la santé, puis plus tard pour la retraite ou encore en cas de d’accidents du travail, de chômage ou de maladie professionnelle.
Ce sont des cotisations assurant une solidarité entre tous les travailleurs à l’inverse de ce qui existait dans le passé autour d’œuvres charitables ou de systèmes assurantiels selon les moyens des intéressés.
En fait, c’est une partie du salaire, que l’on peut définir comme salaire socialisé, provenant du prix de la force de travail et des acquis tels ceux garantis dans les conventions collectives ou dans le code du travail ou de la Sécurité sociale.
Ces cotisations ont une histoire, la plupart proviennent de la construction d’une Sécurité sociale établie selon les principes de la solidarité remplaçant les vieux systèmes assurantiels datant d’avant guerre.
Le Conseil national de la résistance (CNR) en fut l’inspirateur. Le législateur à la libération en fut le maitre d’œuvre avec le gouvernement provisoire et la CGT et le parti communiste français furent avec Ambroise Croizat ceux qui concrétisèrent son existence et son financement par la cotisation et refusèrent de mettre en place un système par l’impôt comme en en Grande Bretagne. Le système britannique, faut-il le rappeler, n’est plus aujourd’hui que l’ombre de lui-même sapé par les remises en cause de l’état acoquiné au libéralisme.
Croizat, ministre du travail et de la Sécurité sociale et Pierre Laroque directeur de la sécurité sociale, eurent à faire face aux opposants de la Sécurité sociale afin que celle-ci reste dans les tiroirs et ne fonctionne pas selon les principes de la solidarité et de la cotisation.
Croizat gagna de haute lutte le débat pour que la cotisation soit retenue et l’impôt refusé sous la base que la Sécurité sociale appartenait à ceux qui en avait le plus besoin, c’est-à-dire ceux et celles qui créaient la richesse par leur travail.
Le patronat discrédité par sa collaboration avec les nazis et avec le régime de Vichy, n’était pas possibilité de s’y opposer.
Cependant, les critiques ne tardèrent pas à se multiplier et le patronat et les professions du commerce et de l’artisanat s’opposèrent particulièrement à ce que la cotisation sociale régisse le financement de la Sécurité sociale.
Le débat n’est donc pas nouveau de ces gens là concernant la remise en cause de la cotisation sociale dont d’ailleurs, plus tard ils en profitèrent devant leurs régimes particuliers en faillite.
Le patronat l’a toujours estimé dans ses comptes comme une charge et un cout.
C’est un jugement du profiteur : le salaire brut et celui socialisé sous le biais de cotisations assis pour leur calcul sur l’assiette salariale permettent le développement social et économique en satisfaisant les besoins de la population.
Evidemment, ce prix de la force de travail vient déjouer les calculs patronaux visant à diminuer sous prétextes de charges son prix pour permettre au profit de prospérer avec les dividendes et les actions de plus en plus élevés au fur et à mesure du transfert de la cotisation dite patronale dans les profits.
Alors oui, il y a un leurre : l’intégration de la cotisation des salariés dans le salaire brut est une manipulation patronale.
Alors ils ont trouvé quelques arnaqueurs qui parlent en ce moment dans les présidentielles les uns de supprimer toutes les cotisations sociales et les autres de supprimer celles des salariés pour augmenter leur salaire, disent-ils, la main sur le cœur.
C’est donc une arnaque….
Ainsi ils ont trouvé un stratagème : supprimer la cotisation salariale et faire ainsi gonfler le salaire net et faire croire que les salariés palperont un salaire plus élevé en ne regardant que le net à payer qui sera plus élevé.
Illusions….
En effet qui paiera alors les prestations en matière de maladie, de mutuelles, la retraite régime général et celle des complémentaires etc. ?
Nous nous trouverons alors dans plusieurs cas de figure :
1) Une TVA sociale (avancée par la droite et aussi par le caméléon Macron mais aussi certains sociaux libéraux) qui demain pourrait être ajustée et augmentée selon les dépenses à assurer par les consommateurs dont on sait que les salariés en sont les principaux contributeurs.
2) De reporter sur l’impôt sur le revenu toutes les dépenses de Sécurité sociale et faire payer jusqu’au plus petit salaire la plus petite retraite ou pension.
3) De garder un minimum de cotisations sociale pour financer le gros risques maladie et confier aux assurances privées et aux mutuelles la totalité des autres prestations maladie mais aussi de réduire la retraite à un minimum (fusion régime général et Arco et Agirc avec un système par point individuel et en fonction d’un prix du point reflétant la réalité du précariat du salarié et des salaires versée souvent plus bas) et pour compléter avec l’obligation de s’assurer individuellement dans des retraites par capitalisation.
Dans ce cadre, évidemment le patronat sera la grand gagnant puisqu’il ne paiera plus aucune centime de cotisations sociales et c’est déjà le cas en partie avec les exonérations jusqu’à 1,6 smic.
Je rappelle que ces exonérations en matière de cotisations dites de l’employeur devaient permettre aux entreprises, libérées de ces charges comme ils disaient, de créer plus d’un million d’emploi selon Gattaz. Résultat affiché par le pole emploi plus de 500000 chômeurs en plus depuis le quinquennat de Hollande et plein de salariés en emplois précaires mal payés et de nombreux sans emploi à la rue.
Donc, un leurre, une farce, une tromperie sur la marchandise puisque ce que les salariés récupéreront en salaire direct le perdront par l’augmentation de la TVA ou autres subterfuges décrits précédemment : leur supplément de revenus en salaire sera vite pompé dans la non revalorisation de leur salaire et l’abaissement de celui-ci par un prix de la force de travail dégradé puisqu’en même temps les heures supplémentaires ne seront plus payées ou alors au minimum de 10 %.
A noter également qu’en même temps le patronat compte réaliser une plus grande productivité du travail sans en payer le prix aux salariés concernés.
Le patronat et l’assurance privée seront donc les seuls bénéficiaires de cette manipulation concernant la cotisation sociale.
Le financement de la Sécurité sociale par l’impôt ou par des contrats d’assurances privées tant pour la santé que pour les retraites entrainerait alors à des grandes inégalités entre ceux qui auront les moyens de se payer des contrats complémentaires les plus sophistiqués et les autres réduits à une médecine du pauvre et à des retraites minables.
En fait, en radiant la cotisation sociale, c’est la remise en cause de la plus belle conquête de la libération, celle que les français tiennent plus : la Sécurité sociale.
Bernard LAMIRAND Animateur du comité d’honneur national Ambroise Croizat