Inhabituels dans la branche pharmaceutique, les mouvements sociaux chez les Big Pharma se multiplient à bas bruit.
La pénurie de médicaments atteint des sommets et devient visible dans les pharmacies un peu partout en France, mais aussi chez nos voisins européens : plus de 1 000 étaient en rupture de stock fin octobre 2022 sur l’Hexagone, 1 700 en tension. La pénurie touche des produits très courants comme le paracétamol, l’amoxicilline ou encore la cortisone.
Nous sommes aujourd’hui en France à un mois de stock, contre trois mois en temps normal. Un mois, ce n’est rien de trop, surtout en hiver.
Parmi les produits indisponibles, 170 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur, selon les chiffres de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
« Derrière ce phénomène qui prend des proportions inédites fin 2022, il n’y pas la guerre en Ukraine, ni la politique zéro-Covid en Chine, mais la désindustrialisation du secteur pharmaceutique : 80% de nos principes actifs sont fabriqués en Asie, Chine et Inde principalement. Et il faut 45 jours pour traverser les mers », constate Manu Blanco, secrétaire fédéral de la Fnic CGT (Fédération nationale des industries chimiques), en charge des industries de santé.
Grèves sur les lignes de production, marges de 30%
Autre cause de la pénurie, et qui passe sous les radars médiatiques, plusieurs mouvements sociaux dans l’industrie pharmaceutique.
Les salarié.es de DSM, Pierre Fabre, Cenexis, Sanofi sont en grève pour demander une revalorisation des salaires face à l’inflation, et la diminution des contrats précaires.
Chez Sanofi, 15 sites de production sont en grève reconductible depuis mi-novembre. Un phénomène inhabituel dans la branche, et le patronat reste sourd à ces demandes légitimes. Pourtant, le secteur est l’un des plus riches de notre pays, il dégage des marges moyennes de 30% !
270 sites de production en France pour 130 entreprises
Le chiffre d’affaires des Big Pharma a explosé, elles en profitent pour se désengager (Pierre Fabre et Servier ont abandonné le diabète et la maladie d’Alzheimer), multiplier la sous-traitance, rationaliser leur outil de production.
« Parfois, une molécule comme la Dépaquine est produite sur un seul site, à Mourenx (Pyrénées Atlantiques) : l’usine a été l’arrêt pendant trois mois à cause de rejets polluants dans l’atmosphère, et on a été au bord de la rupture de stock », illustre Manu Blanco.
Idem pour le Doliprane produit sur deux sites seulement de Sanofi, à Lisieux et Compiègne.
Le secteur compte 270 sites de production en France pour 130 entreprises et 98 000 salarié.es.
La CGT demande un juste partage des richesses des Big Pharma, mais aussi de tout mettre en œuvre pour retrouver l’indépendance thérapeutique de la France. Pour atteindre cet objectif, une seule solution : réinternaliser la production de médicaments, reconstruire et relocaliser l’outil industriel.