Le groupe ST-Microelectronics, multinationale franco-italienne spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation de puces électroniques, se présente comme ardemment impliqué dans la lutte contre les discriminations sexistes et sexuelles. Malheureusement, derrière l’affichage, la réalité est moins rose que leur pink-washing.
Dix salariées techniciennes et cadres, syndiquées de la CGT, discriminées pour certaines dès l’embauche, ont décidé de mettre en lumière cette hypocrisie.
Elles ont porté ensemble leurs affaires aux prud’hommes, puis à la cour d’appel de Grenoble, pour faire la démonstration de la défaillance du groupe dans son traitement de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Pour étayer leur position, les salariées se basaient, en grande partie, sur l’analyse des données chiffrées de l’entreprise (bilans sociaux, rapports de situation comparée, etc.) et sur des panels de comparaison. Elles se basaient aussi sur des analyses effectuées par l’inspection du travail ainsi que des expertises indépendantes.
Gain de cause pour les salariées
Le 26 octobre, la cour d’appel de Grenoble leur a donné raison. La discrimination « générale » (ou systémique) est retenue dans les dix arrêts, et l’intégralité des salariées a obtenu gain de cause pour un total de plus de 815 000 euros de dommages et intérêts en cumulé.
Certaines ont aussi fait reconnaître un harcèlement discriminatoire et un licenciement discriminatoire, et pour huit d’entre elles, les débats sont rouverts pour connaître le niveau de leurs rappels de salaire depuis leur repositionnement théorique en 2015 – ce qui devrait porter l’addition totale à plus d’un million d’euros pour ST-Microelectronics.
Le groupe avait basé sa défense sur des outils de lutte contre la discrimination, qui ont été rapidement écartés par la cour. En effet, ils ont été jugés inappropriés, car ils permettaient la dissimulation de la discrimination. Il a également tenté de garder la plus grande opacité sur les données de comparaison sollicitées par les salariées.
Une grande victoire, tant d’autres à obtenir
Si ces femmes – pour la plupart toujours salariées du groupe – se réjouissent de l’aboutissement victorieux d’une bataille menée depuis plus de dix ans contre l’inégalité entre les femmes et les hommes, elles appellent leurs collègues femmes à s’appuyer sur ces décisions pour s’organiser collectivement avec la CGT et négocier âprement leurs augmentations salariales lors des prochaines négociations annuelles obligatoires.
L’entreprise ST-Microelectronics n’est pas un cas isolé. Les femmes gagnent en moyenne 27 % de moins que les hommes, et leurs pensions sont inférieures de 40 % à celles des hommes. Les métiers à prédominance féminine sont dévalorisés, et les femmes sont particulièrement touchées par les temps partiels subis. Près de 64 % des salarié·es au Smic sont des femmes.
Pour lutter contre ces inégalités, le gouvernement a créé un index égalité, qui comme les outils de ST-Microelectronics dissimule plus les discrimination qu’il ne les combats. La CGT propose des solutions beaucoup plus efficaces :
- revaloriser les métiers à prédominance féminine ;
- réviser l’index égalité pour qu’il fasse toute la transparence sur les inégalités et sanctionner les entreprises qui discriminent ;
- créer de nouveaux droits et moyens pour prévenir et lutter contre les violences sexistes et sexuelles au travail et en dehors ;
- créer un service public de la petite enfance, de proximité financièrement accessible à tou·tes ;
- allonger le « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » à quatre mois, intégralement rémunérés ;
- mettre fin aux temps partiels subis ;
- mettre fin aux systèmes opaques d’individualisation des rémunérations et des primes ;
- conditionner l’octroi des marchés publics à l’égalité salariale.
Nous ne nous ferons pas entendre sans mobilisation. Rendez-vous le 8 mars, journée de lutte pour les droits des femmes, pour faire valoir ces légitimes revendications !