L’argument « phare » du projet de loi El Khomri est que la déréglementation du marché du travail est nécessaire pour créer des emplois. Ce vieil argument libéral ne résiste pourtant pas à l’épreuve des faits.
Même le Fonds monétaire international (FMI), institution pourtant réputée libérale, reconnaît que cette déréglementation n’a pas d’impact significatif sur la « productivité totale des facteurs », c’est-à-dire la combinaison de la productivité du travail et du capital qui détermine le potentiel de croissance économique et, partant, celui de création d’emplois.
Selon les experts du FMI : « une utilisation plus intense de la main d’oeuvre fortement qualifiée, des intrants tirés de l’investissement dans les TIC [autrement dit, les retombées positives des investissements dans
les technologies de l’information et de la communication], ainsi que de plus fortes dépenses pour les activités de R & D contribuent positivement et de façon statistiquement significative à la productivité totale des facteurs…
A contrario, la réglementation du marché du travail n’a pas (…) d’effets statiquement significatifs sur la productivité totale des facteurs à court et à long terme.
Comme le rappelle Eloi Laurent, professeur d’économie à Sciences-Po de Paris (Libération, 23/02/2016), avec le même droit du travail qu’aujourd’hui, la France connaissait un taux de chômage de 7 % avant la crise financière de 2008 et avant la mise en place des politiques d’austérité. Selon cet expert : « On ne trouve pas en économie la preuve incontestable que le salaire minimum fait augmenter le chômage. Au contraire, les études les plus convaincantes montrent que l’existence d’un salaire minimum permet de réduire les inégalités sans aggraver le chômage.
Mais le politique s’empare du fantasme de la flexibilité, et ce discours devient un impératif social. Et les citoyens finissent par s’en convaincre : ce discours s’ancre dans les esprits à la manière d’une croyance. Et l’économie devient une espèce de nébuleuse de légendes à usage social. »
Nasser Mansouri Guilani extrait de « lettre économique n°17 «